Les abords de la Véloroute sont aménagés pour nous permettre des haltes régulières. Chacune d’entre elles se double d’une étape culturelle, grâce aux panonceaux verts judicieusement disposés, qui nous permettent de tourner le regard vers des perles du patrimoine, souvent négligées par les circuits touristiques. Châteaux perchés sur les collines qui escortent la vallée, moulins cachés dans une anse de la rivière, humbles chapelles bâties dans des hameaux paisibles, nous prenons le temps, loin du bruit des moteurs, de nous émerveiller devant cette profusion de découvertes. Même Sam en redemande sur les légendes des châteaux, lui qui n’est pas précisément fan des cours d’histoire au collège !
Des passerelles modernes permettent d’enjamber l’Isle sans efforts et de serpenter sans quitter la rivière des yeux. Sur la passerelle de Saint-Astier, Samuel pousse une exclamation en apercevant un banc de gros poissons – Jonathan pense que ce sont des carpes – qui remontent le courant. Sam n’est pas au bout de ses surprises quand il fait face aux esturgeons du domaine Huso, où l’on produit le caviar de Neuvic, un des plus réputés de France. Du caviar ! Comme pour les princesses russes ! Les yeux ronds de Léa augurent déjà de ce qu’elle pourra raconter à ses copines une fois rentrée à Québec !
Jonathan et moi, de notre côté, ne perdons pas une miette des autres atouts gastronomiques du Périgord qui s’offrent à nous, comme l’huile de noix aux reflets d’or produite au moulin de la Veyssière. Le marché coloré de Saint-Astier nous a procuré de quoi nous régaler d’un copieux goûter à base de produits locaux, sur les tables du site de Mauriac, où le château du XVIe siècle surplombe un barrage bouillonnant. Ça creuse, le vélo !
Mais les enfants en redemandent, nous n’en revenons pas, alors nous décidons avec Jonathan de pousser l’escapade jusqu’aux maisons doubleaudes, dont on nous a vanté l’architecture de torchis et de colombages. Nous apprenons que la Double est une forêt dont les sombres profondeurs auraient pu constituer le décor d’un conte des frères Grimm. Ses marais insalubres ont été asséchés au XIXe siècle, comme l’a raconté le romancier Eugène Le Roy – par ailleurs auteur de Jacquou le Croquant.